Posturo-logique. Equilibre

La recherche de l’équilibre est le facteur déterminant du contrôle postural. Il doit être pour nous, professionnels de santé, une priorité thérapeutique. Le défaut durable d’équilibre est si perturbateur, qu’il est en soi source de douleurs chroniques qu’aucun traitement de physiologie antalgique classique ne sera capable de solutionner. Le traitement symptomatique n’est pas satisfaisant. Il faut aller directement à la cause des douleurs.

Gardons toujours à l’esprit une conception holistique de l’individu.

Le contrôle sensori-moteur de nos postures et de nos mouvements est soumis à fluctuations tout au cours de notre vie. Il se révèle hélas relativement peu performant pour la majorité de la population, malade ou non. Si cet outil est durablement perturbé, à la longue apparaissent : fatigue, tendinopathies, arthralgies dégénératives, hernies discales. Quatre entrées sensorielles peuvent être à l’origine de cette perturbation de contrôle : oreille interne, afférence podale, vue, mâchoire, que nous-nous devons donc de prendre systématiquement en compte. Par ailleurs, très tôt dans la vie (dès l’âge de trente cinq ans), les muscles extenseurs posturaux s’affaiblissent naturellement, ce qui entraîne des difficultés pour le rachis (la colonne vertébrale) à s’adapter à la verticalité. On peine alors, plus ou moins consciemment, à maintenir une posture satisfaisante, c'est-à-dire économique. Par ailleurs lorsqu’une personne âgée chute lourdement, son équilibre peut être définitivement atteint (tableau de « post-chute » et syndrome dysexécutif).

Le comportement moteur humain est organisé par référence à une verticale biologique, construite par le cerveau à partir d’informations visuelles et graviceptives (otolithiques et somesthésiques). Evoquer la notion de position dans un environnement, implique un système associé à un référentiel (Berthoz 1997). Le référentiel basé sur la verticale gravitaire, est majoritairement renseigné par le système vestibulaire. Celui qui est basé sur des points de repère dans l’espace, est majoritairement renseigné par la vue. Quant à celui qui est propre à l’individu, il est basé sur des informations issues du système somesthésique (une des bases du traitement normotensif que je pratique).

Certaines lésions cérébrales peuvent altérer la capacité à maintenir sa position ou à en changer dans les trois postures fondamentales : couchée, assise, debout. Parfois peuvent se rencontrer des anomalies sévères du sens de la verticalité. Cela vaut pour les perceptions : visuelle, tactile, et posturale de la verticale. En pathologie neurologique (ou vestibulaire), les anomalies de la verticale subjective consistent en l’existence d’un biais directionnel, et/ou en une incertitude sur le sens de la verticalité. Toute lésion cérébrale chevauchant une zone impliquée dans l’intégration graviceptive vestibulaire ou somesthésique, peut entraîner une perturbation de la construction de la verticale subjective. Une lésion des voies vestibulaires touchant les voies graviceptives somesthésiques donnera une inclinaison de la verticale subjective portant sur la perception posturale de la verticale. Le thalamus postéro-latéral ne serait pas uniquement un relais pour les voies vestibulaires, il pourrait être une structure fondamentale pour le contrôle de la station érigée. Les gravicepteurs vestibulaires, somesthésiques, et viscéraux contribuent à la mise à jour de cette verticale subjective (Dominic Perennou. L’altération du sens de la verticalité : une nouvelle approche de l’incapacité posturale post AVC. L’AVC de l’urgence à la réadaptation. dominic.perennou@chu-dijon.fr.).

Cependant, si la contribution des informations visuelles et somesthésiques au contrôle de la posture bipédique est bien établie, celle des informations vestibulaires reste sujette à question. Fitzpatrick & MacCloskey (1994) rapportent des seuils de sensibilité des canaux semi-circulaires supérieurs aux accélérations des oscillations posturales classiques observées en posture statique debout non perturbée.

Notre sensibilité tactile est véhiculée par divers mécanorécepteurs (corpuscles de Meissner, de Pacini, de Ruffini, disques de Merckel). Ils fournissent au système nerveux central des informations sur le monde extérieur, essentiellement par le biais des mains et des pieds. Les récepteurs tactiles issus de la sole plantaire ont été le plus largement mis en vedette, mais les autres informations cutanées sont incontournables. Depuis les pieds jusqu’à la tête, la continuité de l’information sensorielle contribuant à notre équilibre, s’opère par le biais de multiples muscles et articulations associés en chaînes. Les voûtes plantaires renseignent sur la variation des appuis, les yeux renseignent sur le rapport à l’environnement. Il y a relation directe entre mâchoire et cou, ainsi qu’existent des connexions entre muscles de l’œil et ceux de la nuque.

La stabilité de la tête ne peut être obtenue que s’il y a équilibre dans les articulations de la mâchoire (Bogumila Sobczak. Influence de la kinésithérapie sur l’état fonctionnel des articulations temporo-mandibulaires, de la colonne vertébrale et des membres. Kinésithérapie Scientifique - N° 433 - Mai 2003. P 19. // Malafosse P. Le trépied de la statique. Kinésithérapie Scientifique. N° 328. Novembre 1993. P 11- 25).

Plusieurs études de recherche (Amblard & Carblanc, 1980 ; Nougier et al., 1997 ; Berencsi et al. , 2005 ; Schmid et al., 2008 ; Uchiyama & Demura, 2008) suggèrent d’une part que les visions centrale et périphérique jouent un rôle complémentaire dans le contrôle de la posture bipédique, d’autre part que la contribution relative de chacune des visions est dépendante des informations fournies par les autres systèmes sensoriels, notamment les informations somato-sensorielles issues du segment pied-cheville. Si les capteurs sensoriels sont localisés dans différentes parties du corps, l’information qu’ils génèrent converge vers des structures sous-corticales et corticales communes qui contrôlent le système postural par l’intermédiaire de différents réflexes. Le réflexe vestibulo-oculaire permet la stabilisation du regard, les réflexes vestibulo-spinal et vestibulo-oculo-cervical permettent le contrôle global et le maintien de la posture par leur action sur le réflexe myotatique.

A prendre en compte.

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